La voie vers l’équilibre s’accompagne de risques accrus : Mise à jour économique et financière de l’automne du Québec

Canadian Economics

By: CBoC Economics Team

English

Perspectives de croissance réduites à cause de la hausse des taux d’intérêt

  • Dans sa mise à jour de l’automne, le gouvernement du Québec a reconnu l’effet inhibiteur des hausses des taux d’intérêt sur la croissance économique qui se manifeste à travers plusieurs canaux économiques. La construction de logements a déjà connu une forte baisse, et la résilience de longue date de la demande des consommateurs commence à s’effriter. Sur le marché du travail, l’activité se modère à mesure que la demande de biens et de services diminue.
  • Le Québec maintient sa prévision de croissance du PIB à 0,6 % pour 2023, conforme au budget de printemps. Cependant, des dépenses moins élevées et un déclin plus marqué du marché du travail signifient que la prévision de croissance du PIB réel en 2024 a été réduite de moitié depuis le budget de printemps et s’établit désormais à seulement 0,7 %. Le gouvernement attribue la révision à la baisse des perspectives de croissance pour 2024 à une inflation persistante et à la hausse des taux d’intérêt dans le monde entier.
  • Notre propre perspective économique pour le Québec est plus pessimiste que celle du gouvernement. Nous anticipons une croissance de seulement 0,1 % en 2023 et à nouveau en 2024. Des prévisions plus faibles de la consommation et de l’investissement sous-tendent notre perspective plus pessimiste.
  • Le gouvernement reconnaît que les conditions de crédit en détérioration minent la confiance des consommateurs et des entreprises. Le gouvernement prévoit que la croissance de la consommation des ménages ralentira, passant de 2,8 % cette année à seulement 0,8 % en 2024. Nous anticipons un ralentissement plus marqué, avec une croissance de la consommation des ménages qui devrait tomber à 0,4 % en 2024.
  • Cette année, la croissance de la population du Québec atteindra son plus haut niveau depuis 1959. Cette expansion marquée est soutenue par l’arrivée de 62 000 immigrants et environ 150 000 résidents non permanents. Cependant, malgré la hausse en 2023, la croissance de la population du Québec est inférieure à la moyenne nationale et à celle de la plupart des autres provinces. Dans les années à venir, une immigration planifiée moins importante par rapport au reste du Canada pèsera sur la croissance de la population au Québec, maintenant la tension sur le marché du travail et limitant la croissance de la consommation et de la demande d’investissement.

La province réduit la provision pour éventualités, laissant peu de marge pour faire face à un ralentissement économique

  • Malgré un climat économique plus faible qu’au printemps, le plan financier actualisé du Québec montre seulement une légère réduction des recettes. Dans l’ensemble, la province s’attend à ce que les recettes propres soient d’environ 500 millions de dollars de moins pour l’exercice 2023–24 par rapport aux estimations précédentes. Cependant, les perspectives à long terme des recettes sont en réalité supérieures à celles du budget, s’élevant en moyenne à 500 millions de dollars par an au cours des quatre prochaines années.
  • La perspective de revenus propres moins élevée cette année s’explique principalement par une réduction des recettes de l’impôt sur le revenu des particuliers, tandis que la perspective plus élevée pour les années suivantes s’explique par une estimation beaucoup plus élevée des recettes de l’impôt sur le revenu des sociétés. Les perspectives des recettes de la TVQ sont similaires à celles du budget.
  • La mise à jour de l’automne prévoit désormais que les dépenses de programme seront d’environ 1,9 milliard de dollars de plus par an au cours des cinq prochaines années. Beaucoup de ces coûts sont affectés à une augmentation des dépenses pour des initiatives en matière de logement (1,1 milliard de dollars au total au cours des trois prochaines années) et des initiatives liées au climat (800 millions de dollars au cours des trois prochaines années). Les charges de la dette devraient augmenter d’environ 500 millions de dollars au cours des trois prochaines années.
  • Le plan financier actualisé s’accompagne également un niveau beaucoup plus bas de la provision pour éventualités et d’une contribution moindre au Fonds des générations par rapport au budget.
  • Dans l’ensemble, la mise à jour financière de l’automne du Québec met en évidence une trajectoire vers un excédent de 4 millions de dollars pour l’exercice 2027–28, ce qui est conforme à ce qui avait été estimé dans le budget. Cependant, cet excédent prévu s’accompagne d’une réduction totale de 400 millions de dollars des paiements au Fonds des générations et de 4,5 milliards de dollars de moins en provision pour éventualités au cours des cinq prochaines années.

Les mesures politiques tentent d’atténuer toutes les fausses notes

  • Le gouvernement a annoncé près de 4,3 milliards de dollars de nouvelles mesures ciblées au cours des cinq prochaines années, couvrant le logement, la transition climatique, l’investissement des entreprises, la formation et les sans-abri. Cependant, les nouvelles dépenses seront réparties de manière inégale.
  • Reflet des pressions générales sur l’économie, le logement constituera la plus grande dépense de politique nouvelle. Grâce à un nouvel accord entre le gouvernement fédéral et le gouvernement du Québec, plus de 1,8 milliard de dollars seront consacrés à l’accélération de la construction de 8 000 unités sociales et abordables. La majeure partie des dépenses se produira en 2025–26 et diminuera au cours de la période de prévision. Les détails sur la manière dont les fonds seront alloués seront annoncés ultérieurement.
  • L’action sur le changement climatique est principalement liée à l’aide aux communautés et au secteur forestier pour se remettre de la saison des incendies massifs de l’été 2023 (environ 400 millions de dollars sur cinq ans). Un montant supplémentaire de 300 millions de dollars sera consacré à atténuer les risques associés aux futurs incendies de forêt. Le gouvernement renforce également son programme d’aide d’urgence pour les transports en commun par un montant supplémentaire de 265 millions de dollars cette année fiscale.
  • En raison du risque de freiner la croissance de la productivité et des normes de vie, le faible niveau d’investissement des entreprises constitue un défi dans l’ensemble du pays. Le Québec renouvellera, prolongera et simplifiera son programme d’aide fiscale C3i pour soutenir l’acquisition d’équipements de fabrication et de traitement, de matériel informatique et de logiciels de gestion. L’aide sera la plus importante pour les investissements dans les zones économiques déprimées et la moins importante pour ceux dans les régions de Montréal et de Québec.
  • Les postes vacants sont une préoccupation particulière au Québec, et une aide à la formation de 261 millions de dollars sera consacrée aux métiers spécialisés dans le secteur de la construction et de la santé au cours des deux prochaines années. Les efforts se concentreront sur l’ajout de capacité aux programmes de diplôme et l’accélération de la formation.

Les marchés du travail tendus ajoutent des défis

  • Avec peu de marge de manœuvre, le gouvernement du Québec s’est concentré sur le logement, les sans-abri et la formation, en particulier dans la construction et les soins de santé, pour remédier aux pénuries de main-d’œuvre. Cependant, le problème des pénuries de main-d’œuvre dans la province va au-delà des compétences et de la formation pour toucher le manque de travailleurs disponibles. Le taux de chômage du Québec est l’un des plus bas du pays, et notre prévision pour la province est que le chômage atteindra son pic à seulement 5,2 % l’année prochaine malgré une perspective économique très faible.
  • L’inflation élevée et les pénuries de main-d’œuvre ont conduit à des conflits du travail à travers le Canada, et le Québec ne fait pas exception. Environ 600 000 fonctionnaires de la province ont pris des mesures de grève pour réclamer plus que le 10,3 % d’augmentation de salaire sur cinq ans prévu dans la mise à jour économique. Cela constitue un risque à la hausse pour les dépenses prévues par le gouvernement.
  • Bien que les perspectives économiques plus faibles n’aient pas affecté le plan du gouvernement d’équilibrer les comptes d’ici 2027–28, cela se fait en contribuant moins au Fonds des générations et en tenant un coussin financier beaucoup plus réduit. Nos propres estimations économiques sont plus faibles que celles du gouvernement du Québec, et parce que la majorité de la provision pour éventualités est supprimée avec la mise à jour de l’automne, les risques pour les finances de la province, tant en ce qui concerne la croissance des revenus que la trajectoire de l’équilibre, penchent désormais vers le bas.

Analyses budgétaires 2023

Comments