Mortalité infantile

Messages clés

  • L’Île-du-Prince-Édouard et la Colombie-Britannique obtiennent chacune un « B » et sont les provinces les mieux classées, affichant le taux de mortalité infantile le plus faible au Canada entre 2009 et 2011.
  • L’Alberta et Terre-Neuve-et-Labrador reçoivent un « D », tandis que la Saskatchewan, le Manitoba, les Territoires du Nord-Ouest et le Nunavut écopent d’un « D- », en raison d’un taux de mortalité infantile supérieur à celui du pays le plus mal classé, à savoir les États-Unis.
  • Avec 18,5 décès en moyenne pour 1 000 naissances vivantes entre 2009 et 2011, le taux moyen de mortalité infantile du Nunavut est plus de trois fois supérieur à la moyenne nationale.

Mettre la mortalité infantile en contexte

Selon le Panorama des statistiques de l’OCDE 20091, « le taux de mortalité infantile, qui représente la proportion de décès de bébés de moins d’un an, témoigne de l’incidence de la situation matérielle et sociale sur la santé des mères et des nouveau-nés, ainsi que de l’efficacité des systèmes de santé ». De nombreux spécialistes de la santé considèrent le taux de mortalité infantile comme un indicateur sentinelle de la santé des enfants et du bien-être d’une société au fil du temps. En effet, la mortalité infantile est « un indicateur important du bien-être des nourrissons, des enfants et des femmes enceintes, car elle est associée à divers facteurs, comme la santé maternelle, la qualité et l’accessibilité des soins médicaux, les conditions socioéconomiques et les pratiques en matière de santé publique2 ».

La mortalité infantile indique également les disparités qui existent entre différentes populations en matière de santé, d’un pays à l’autre ou au sein d’un même pays. Selon le Rapport sur le développement humain 2005 de l’Organisation des Nations Unies, « aucun indicateur ne montre mieux les différences dans le développement humain que la mortalité postinfantile3 ». La mortalité infantile est souvent utilisée pour mesurer la santé et le bien-être d’une nation, parce que les facteurs ayant une incidence sur la santé de populations entières peuvent aussi influer sur le taux de mortalité des nourrissons4.

Comment les provinces et les territoires s’en sortent-ils par rapport aux pays comparables au Canada?

Parmi les 16 pays analysés dans le bilan comparatif, 12 affichent un taux de mortalité infantile moyen inférieur à 4. Au Japon, en Suède, en Finlande et en Norvège, le taux de mortalité infantile moyen sur trois ans est inférieur à 3 décès pour 1 000 naissances vivantes. L’Île-du-Prince-Édouard et la Colombie-Britannique sont les deux seules provinces à se classer à égalité avec la plupart des pays comparables au Canada, avec un taux de mortalité infantile moyen de 3,7 chacune. Elles obtiennent donc un « B », tout comme le Nouveau-Brunswick qui, entre 2009 et 2011, a enregistré un taux de mortalité infantile moyen de 4,2.

Dans l’ensemble, le Canada enregistre un taux de mortalité infantile moyen de 4,9 décès pour 1 000 naissances vivantes, ce qui est nettement supérieur au taux moyen sur trois ans affiché par la plupart des pays comparables. Il reçoit donc un « C » pour cet indicateur. Parmi les pays comparables, seuls les États-Unis font moins bien que lui, avec un taux moyen de 6,2 décès pour 1 000 naissances vivantes.

Quatre provinces ont des résultats inférieurs à la moyenne canadienne pour cet indicateur : l’Alberta, Terre-Neuve-et-Labrador, le Manitoba et la Saskatchewan. Le Manitoba et la Saskatchewan sont les deux seules provinces à écoper d’un « D- », parce que leur taux est supérieur à celui des États-Unis. Les Territoires du Nord-Ouest et le Nunavut reçoivent également un « D- » et ferment la marche du classement.

Comment se situent les provinces et les territoires les uns par rapport aux autres?

L’Île-du-Prince-Édouard et la Colombie-Britannique sont les deux seules provinces à afficher un taux de mortalité infantile moyen inférieur à 4 décès pour 1 000 naissances vivantes. Au total, six provinces et un territoire (le Yukon) ont un taux de mortalité infantile inférieur à la moyenne nationale. En Alberta et à Terre-Neuve-et-Labrador, le taux de mortalité infantile moyen est supérieur à 5, tandis qu’en Saskatchewan et au Manitoba, provinces les moins bien classées, il dépasse les 6 décès pour 1 000 naissances vivantes. Les Territoires du Nord-Ouest et le Nunavut se situent au bas du classement. Le Nunavut est un cas particulier en ce qui concerne la mortalité infantile, avec un taux moyen de 18,5 décès pour 1 000 naissances vivantes entre 2009 et 2011.

Pourquoi la mortalité infantile est-elle si élevée au Nunavut et dans les Territoires du Nord-Ouest?

Dans les Territoires du Nord-Ouest et au Nunavut, le taux de mortalité infantile est nettement supérieur à la moyenne canadienne. En effet, le Nunavut enregistre un taux moyen sur trois ans de 18,5 décès pour 1 000 naissances vivantes, ce qui est beaucoup plus élevé que le taux de 8 enregistré par les Territoires du Nord-Ouest, qui arrive avant-dernier au classement. L’une des principales causes de la mortalité infantile au Nunavut est le syndrome de mort subite du nourrisson (SMSN), notamment dû au fait que les nourrissons ne dorment pas sur le dos ou qu’ils partagent le lit parental5. Chez les Inuits (qui constituent la majeure partie de la population du Nunavut), le SMSN est la principale cause de mortalité infantile, mais il en existe d’autres, dont les anomalies congénitales, les infections et les affections liées à un faible poids à la naissance ou à une naissance prématurée, comme des organes insuffisamment développés6. Certains de ces décès peuvent être évités, avec l’aide de programmes d’information sur les méthodes adéquates pour coucher les bébés et une plus grande sensibilisation aux méfaits du tabagisme pendant la grossesse. Le tabagisme maternel est plus fréquent chez les Inuites et accroît les risques de SMSN, de naissance prématurée et d’infection postnatale. Les grossesses précoces sont elles aussi associées à un taux plus élevé de mortalité infantile, et le Nunavut enregistre des résultats nettement supérieurs à la moyenne nationale en ce qui a trait au nombre moyen de grossesses de femmes de moins de 20 ans7.

Comment les provinces s’en sont-elles sorties au cours des 20 dernières années?

Le taux de mortalité infantile a diminué dans toutes les provinces, sauf au Manitoba. En 1991, la Nouvelle-Écosse affichait le taux le plus bas, avec 5,7 décès pour 1 000 naissances vivantes, tandis que Terre-Neuve-et-Labrador et la Saskatchewan enregistraient les taux les plus élevés, avec respectivement 7,8 et 8,2 décès pour 1 000 naissances vivantes. Depuis le début des années 1990, le Nouveau-Brunswick et l’Île-du-Prince-Édouard ont fait de nets progrès, dépassant toutes deux la Nouvelle-Écosse pour afficher le taux de mortalité infantile le plus faible du pays en 2011. La Nouvelle-Écosse se classait au sixième rang parmi les provinces en 2011, tandis que la Colombie-Britannique, le Québec et l’Ontario affichaient toutes des taux plus faibles. La Saskatchewan et Terre-Neuve-et-Labrador restent parmi les provinces ayant le taux de mortalité infantile le plus élevé. Elles ont été rejointes par le Manitoba – seule province dont le taux de mortalité infantile a augmenté entre 1991 et 2011.

Le poids de naissance contribue-t-il à expliquer la différence entre les taux de mortalité infantile parmi les provinces et les territoires?

Un bébé de faible poids à la naissance reste beaucoup plus exposé au risque de décès qu’un bébé de poids normal, mais d’autres facteurs influent aussi sur le taux de mortalité infantile. Parmi les provinces, l’Île-du-Prince-Édouard et la Colombie-Britannique ont le taux de mortalité infantile le plus bas et la plus petite proportion de bébés ayant un faible poids à la naissance. Toutefois, les similitudes s’arrêtent là. En effet, la Saskatchewan et le Manitoba arrivent en queue de peloton pour le taux de mortalité infantile, mais se classent en quatrième et cinquième positions parmi les provinces pour la proportion de bébés ayant un faible poids à la naissance. De leur côté, l’Alberta et l’Ontario, qui se positionnent en milieu de classement pour le taux de mortalité infantile, présentent la plus grande proportion de bébés ayant un faible poids à la naissance parmi les provinces.

En Saskatchewan et au Manitoba, le taux plus élevé de mortalité infantile s’explique probablement par la plus forte proportion de population autochtone. Selon le Centre for Research on Inner City Health, si le taux de bébés ayant un faible poids à la naissance est à peu près similaire pour les Autochtones et les non-Autochtones, le taux plus élevé de naissance prématurée, le taux plus bas d’allaitement et le plus grand nombre de SMSN chez les Autochtones pourraient expliquer le taux de mortalité infantile plus élevé enregistré dans ces deux provinces8. On pourrait avancer la même explication pour les Territoires du Nord-Ouest, qui présentent eux aussi un taux élevé de mortalité infantile, alors qu’ils affichent une petite proportion de bébés ayant un faible poids à la naissance.

Par contre, au Yukon, le taux remarquablement bas de bébés ayant un faible poids à la naissance se reflète dans la mortalité infantile, qui y est peu élevée, tandis que le fort taux de mortalité infantile du Nunavut est peut-être influencé par sa grande proportion de bébés de faible poids à la naissance. En effet, le Nunavut est le seul territoire à enregistrer des résultats supérieurs à la moyenne canadienne pour cet indicateur. Avec des taux respectifs de 4,9 % et de 5,2 %, le Yukon et les Territoires du Nord-Ouest font mieux que toutes les autres provinces, à l’exception de l’Île-du-Prince-Édouard.


Pourquoi le Canada et la plupart des provinces ont-ils d’aussi mauvais résultats en ce qui concerne la mortalité infantile?

Les disparités entre le Canada, ses provinces et les autres pays comparables peuvent en partie venir des différences internationales qui existent dans la manière d’enregistrer les bébés ayant un poids extrêmement faible à la naissance. C’est pour cela que certains chercheurs recommandent d’interpréter avec prudence les comparaisons entre pays9. Toute disparité entre les pays peut entraîner une sous-déclaration des décès infantiles, particulièrement par rapport à des pays utilisant une définition plus large des naissances vivantes. À présent que le taux de mortalité infantile est largement inférieur à ce qu’il était autrefois, les différences dans l’enregistrement peuvent jouer un rôle plus important pour expliquer les écarts qui existent d’un pays à l’autre.

Cependant, les différences d’enregistrement n’expliquent pas tout. Les déterminants socioéconomiques et environnementaux de la santé des mères et des enfants, de même que les facteurs liés au système de santé, comme l’utilisation de nouvelles technologies, pourraient expliquer le taux relativement élevé de la mortalité infantile au Canada. Ainsi, le pourcentage de bébés prématurés ou ayant un faible poids à la naissance est en hausse, tout comme la fréquence des naissances multiples, augmentant de ce fait le risque de mortalité infantile10. De même, la proportion de mères de plus de 40 ans a augmenté ces dernières années, et la probabilité d’avoir un bébé ayant un faible poids à la naissance est plus grande chez les femmes plus âgées11. Enfin, les progrès des soins périnataux ont peut-être entraîné une augmentation proportionnelle du nombre d’enfants ayant un faible poids à la naissance12.

Le plus grand nombre de bébés prématurés ou ayant un faible poids à la naissance, auquel s’ajoutent les disparités entre les pays pour la définition de « naissance vivante », pourraient contribuer au taux relativement plus élevé de mortalité infantile du Canada. Ces facteurs médicaux et méthodologiques jouent indéniablement un rôle dans le taux de mortalité infantile du Canada. Mais dans quelle mesure? En 2011, le Canada est enfin passé en dessous des 5 décès pour 1 000 naissances vivantes (4,8). Cependant, parmi les pays comparables, 14 sont passés sous cette barre depuis un certain nombre d’années, ce qui laisse penser qu’il faut s’attacher à mieux comprendre les différences internationales entre les taux de mortalité infantile – que celles-ci soient dues à des facteurs méthodologiques ou socioéconomiques, voire aux deux.

Notes de bas de page

1    Organisation de coopération et de développement économiques, Panorama des statistiques de l’OCDE 2009 : Économie, environnement et société, Paris, Éditions OCDE, 2009, p. 246.

2    MedicineNet.com (consulté le 29 septembre 2014).

3    Organisation des Nations Unies, Rapport sur le développement humain 2005, New York, Programme des Nations Unies pour le développement, 2005, p. 4.

4    Centres pour le contrôle et la prévention des maladies, « Infant Mortality » (consulté le 29 septembre 2014).

5    Sorcha A. Collins, Pamela Surmala, Geraldine Osborne et coll., « Causes and Risk Factors for Infant Mortality in Nunavut, Canada 1999–2011 », BMC Pediatrics, vol. 12, no 190, 2012.

6    Zhong-Cheng Luo, Sacha Senécal, Fabienne Simonet et coll., « Birth Outcomes in the Inuit-Inhabited Areas of Canada », CMAJ, vol. 182, no 3, 23 février 2010.

7    Statistique Canada, Tableau 106-9002 – Issues de la grossesse, selon le groupe d’âge, Canada, provinces et territoires, annuel, CANSIM (base de données) (consulté le 29 septembre 2014).

8    Centre for Research on Inner City Health, Indigenous Children’s Health Report: Health Assessment in Action, Toronto, CRICH, 2009, p. 30.

9    K.S. Joseph, Shiliang Liu, Jocelyn Rouleau et. coll., « Influence of Definition Based Versus Pragmatic Birth Registration on International Comparisons of Perinatal and Infant Mortality: Population Based Retrospective Study », The BMJ, février 2012.

10    Nora Bohnert, Mortalité : aperçu, 2008 et 2009, Ottawa, Statistique Canada, juillet 2013.

11    Ibid.

12    Ibid.