Achèvement des études collégiales

Messages clés

  • Trois provinces canadiennes (Nouveau-Brunswick, Île-du-Prince-Édouard et Ontario) décrochent un « A+ » pour cet indicateur, grâce à leurs taux supérieurs à celui du pays en tête du classement, à savoir le Canada.
  • La plupart des provinces ont un taux de diplomation collégiale supérieur à celui de tous les pays comparables au Canada.
  • Le nombre de Canadiens ayant suivi des études collégiales est probablement sous-estimé, car les chiffres présentés ne tiennent pas compte des personnes ayant fréquenté le collège puis l’université, ou inversement.

L’achèvement des études collégiales mis en contexte

Des citoyens instruits participent plus activement à la société : ils tendent à prendre de meilleures décisions sur des facteurs touchant à leur qualité de vie (p. ex. le régime alimentaire, le tabac, l’exercice physique) et ils gagnent un salaire plus élevé que les personnes moins instruites. Ce que les décideurs savent aussi très bien, et dont le grand public a moins conscience, c’est que les personnes instruites et qualifiées contribuent largement à l’innovation et à la productivité des entreprises ainsi qu’à la performance économique du pays. Dans une économie mondiale interdépendante, les pays (et les provinces) qui comptent davantage de travailleurs hautement qualifiés possèdent un net avantage compétitif.

Quelle définition de « collège » utilise-t-on dans ce bilan comparatif?

Les données internationales sur l’achèvement des études collégiales proviennent de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). L’OCDE utilise la définition établie dans la Classification internationale type de l’éducation (CITE), qui diffère légèrement de la manière dont les Canadiens classifient généralement l’enseignement postsecondaire. Dans la CITE, les programmes de formation professionnelle (y compris les certificats et les diplômes des écoles de métiers) ne sont pas considérés comme des programmes collégiaux. Par conséquent, les titulaires de ces certificats et diplômes ne sont pas comptabilisés parmi les diplômés collégiaux. Il s’agit pourtant d’un groupe important au Canada, et probablement dans d’autres pays. Afin d’assurer la cohérence et de faciliter notre analyse, nous avons choisi la définition de la CITE pour comparer les données provinciales et internationales.

Il est important de noter que les pays (ou provinces) qui affichent d’excellents résultats au chapitre de l’achèvement des études collégiales ne feront probablement pas aussi bien sur le plan des études universitaires. En effet, le pourcentage total des diplômés des collèges et des universités dans un pays ne peut pas dépasser 100 %. Par conséquent, à un certain point, l’augmentation du taux de diplômés dans un type d’établissement a pour corollaire la baisse du taux de diplômés dans l’autre type d’établissement. C’est ce qui se passe pour la Norvège, par exemple, qui se classe dernière pour les études collégiales et première pour les études universitaires.

Où se situent les provinces canadiennes par rapport aux pays comparables au Canada?

Dans son ensemble, le Canada affiche le taux le plus élevé de diplomation au collégial par rapport aux pays comparables. En fait, chaque province, à l’exception de la Saskatchewan, affiche un taux supérieur à celui des pays comparables au Canada. Trois provinces décrochent un « A+ », car leur taux est supérieur à celui du pays en tête du classement, à savoir le Canada. Seuls le Japon et la Belgique affichent un taux supérieur à celui de la province la moins performante pour cet indicateur, à savoir la Saskatchewan, qui obtient un « B ».

Le Nouveau-Brunswick, l’Ontario, et l’Î.-P.-É arrivent en tête du classement, occupant ex-æquo la première place avec 28 % de leur population en âge de travailler possédant un diplôme d’études collégiales en 2011. Ce taux de diplomation est 2,7 fois plus élevé que celui des États-Unis et 12,6 fois plus que celui de la Norvège. L’importance qu’un pays accorde au système collégial ou au système universitaire peut dépendre en partie de sa structure industrielle. Ainsi, au Japon, où la fabrication de haute technologie occupe une grande place, beaucoup d’étudiants suivent des études professionnelles dans des collèges technologiques ou professionnels, qui les préparent mieux à la vie active. À l’inverse, la Norvège, dont l’économie repose sur le pétrole, se retrouve en bas du classement pour l’importance du secteur de la fabrication de haute technologie et affiche donc un faible taux de diplomation au collégial. En effet, les métiers liés au secteur de l’énergie nécessitent un nombre plus élevé de travailleurs ayant suivi des études professionnelles, lesquelles n’entrent pas dans la définition de « collège » donnée par la CITE.

Comment les provinces s’en sortent-elles les unes par rapport aux autres?

En plus de classer les provinces par rapport à des pays comparables au Canada, nous les avons comparées entre elles et réparties selon trois catégories : « supérieure à la moyenne », « dans la moyenne » et « inférieure à la moyenne »1.

L’Île-du-Prince-Édouard, le Nouveau-Brunswick et l’Ontario se situent au-dessus de la moyenne pour cet indicateur, tandis que la Saskatchewan se classe en dessous de la moyenne. Bien que celle-ci s’en sorte bien par rapport aux pays comparables au Canada, elle se situe en dessous des autres provinces.

Quel serait le classement si on incluait les programmes de formation technique et professionnelle?

La CITE ne prend pas en compte les programmes de formation technique et professionnelle dans sa définition de l’achèvement des études collégiales. Cependant, afin de dresser une image plus complète de cet indicateur pour le Canada, il est important d’inclure ces programmes dans notre analyse.

La prise en compte des programmes de formation technique et professionnelle modifie sensiblement le taux de diplomation au collégial pour certaines provinces. Ainsi, Terre-Neuve-et-Labrador, qui enregistre l’un des taux les plus faibles si l’on s’en tient à la définition de l’OCDE, affiche le taux le plus élevé si l’on comptabilise les programmes de formation technique et professionnelle. Elle gagne huit places, bondissant de la neuvième position à la première, en partie grâce à l’importance de ses industries primaires (secteurs de la pêche, de la foresterie et de l’exploitation minière, etc.).

Que se passe-t-il si l’on examine le flux des diplômés collégiaux plutôt que le stock?

Aux sections précédentes, nous nous sommes uniquement intéressés au « stock » de diplômés collégiaux au sein de la population canadienne en âge de travailler. Une image plus complète de l’achèvement des études collégiales se dessine si nous examinons les taux actuels de diplomation, c’est-à-dire leur « flux » actuel.

Quand la comparaison porte sur les taux provinciaux de diplomation les plus récents, le Québec se retrouve en tête du classement, ce qui n’est guère surprenant compte tenu de la vaste étendue de son programme de collèges d’enseignement général et professionnel (cégeps). Le cégep est un programme préuniversitaire qui est proposé après la 11e année et qui remplace l’année supplémentaire existant au niveau secondaire dans les autres provinces canadiennes. Cependant, comme il s’agit d’un programme de deux ans, il couvre également une année de collège communautaire et fait donc partie de la définition de « collège » selon les normes canadiennes et internationales (CITE). Il est un passage obligé pour entrer à l’université. Les cégeps reçoivent environ 165 000 inscriptions par an2. Le taux de diplomation peut mieux refléter la situation réelle dans le système collégial, car les données de recensement et celles sur la population active renseignent sur le « niveau d’études le plus élevé » atteint par une personne. Par conséquent, les personnes qui achèvent leurs études collégiales et vont à l’université (ou inversement) ne sont comptabilisées qu’en tant que diplômés universitaires.

Pourquoi les provinces des Prairies ont-elles de si mauvais résultats?

Que ce soit pour l’achèvement des études collégiales (y compris les programmes de métiers et de formation professionnelle) ou pour les taux récents de diplômés collégiaux, les provinces des Prairies ne s’en sortent pas très bien. Un certain nombre de facteurs ont été avancés pour expliquer la relative faiblesse du niveau général de scolarité dans ces provinces3 :

  • Certains élèves sont attirés par des emplois lucratifs en Alberta et en Saskatchewan qui n’exigent pas de formation postsecondaire;
  • Les provinces des Prairies comptent davantage d’élèves autochtones que beaucoup d’autres provinces; or, pour de nombreuses raisons, les élèves autochtones continuent à présenter des niveaux de scolarité plus faibles;
  • Le fait d’habiter dans une région rurale ou éloignée constitue un problème supplémentaire. La difficulté d’accéder à l’enseignement postsecondaire et l’idée que les emplois disponibles localement ne requièrent pas un diplôme postsecondaire peuvent inciter les jeunes de ces régions à renoncer à ce type d’études.

Comment les Autochtones du Canada s’en sortent-ils?

Si les Premières Nations, les Métis et les Inuits se situent loin derrière la population non autochtone pour l’achèvement des études secondaires, l’écart est beaucoup moins grand pour les études collégiales. Il est difficile d’obtenir des données complètes sur les Autochtones. Cependant, l’Enquête nationale auprès des ménages de 2011 apporte quelques indications. Selon cette Enquête, les taux de diplomation au collégial chez les Autochtones et chez les non-Autochtones n’affichent qu’un écart de deux points de pourcentage, et même moins dans cinq provinces. C’est à l’Île-du-Prince-Édouard et en Saskatchewan que les écarts sont les plus grands en faveur de la population non autochtone. En Ontario, les Autochtones affichent un taux de diplomation au collégial supérieur à celui des non-Autochtones – soit 27 % contre 23 %, respectivement.

Un diplôme universitaire est-il meilleur qu’un diplôme collégial?

On a longtemps soutenu, en s’appuyant sur les données relatives aux revenus, que l’obtention d’un diplôme universitaire constituait l’indicateur le plus pertinent pour mesurer la capacité du Canada à former des personnes douées en innovation et dotées d’excellentes compétences. Les données sur le « rendement de l’éducation » corroborent cet argument, car les diplômés universitaires, pris globalement, gagnent un salaire supérieur, en moyenne, à celui des diplômés collégiaux.

Cependant, davantage de diplômés universitaires cherchent à obtenir ensuite un diplôme collégial. En 2000, 10 % des diplômés collégiaux avaient auparavant obtenu un diplôme universitaire4. En 2005, ce taux était passé à 13 %5. Cette hausse peut traduire la valeur accordée aux programmes d’études appliquées proposés par les collèges. De plus amples recherches sont nécessaires pour établir le moment auquel les diplômés universitaires s’inscrivent à des programmes collégiaux (p. ex. immédiatement après l’obtention de leur diplôme universitaire ou en milieu de carrière), et les types de programmes suivis (p. ex. une extension de leurs études de premier cycle ou un changement complet d’orientation).

Selon des recherches récentes, la discipline étudiée pourrait être plus importante que le type d’établissement scolaire fréquenté. Ainsi, une étude a établi que les hommes titulaires d’un diplôme universitaire dans des disciplines abstraites comme les lettres et les sciences humaines, la biologie et les sciences agricoles ont un salaire inférieur de plus de moitié à celui des hommes titulaires d’un diplôme universitaire dans des disciplines ayant une portée pratique ou visant des filières professionnelles – comme le commerce, la médecine et l’ingénierie6. Une autre étude a mis en évidence des différences de salaire similaires entre les disciplines collégiales au Canada et constaté que ces écarts poussent les étudiants à s’inscrire dans les disciplines offrant de meilleures perspectives salariales7.

Peut-être la différence entre collège et université est-elle moins importante que l’adéquation de la discipline par rapport au marché de l’emploi, puisque c’est cette adéquation – avec l’offre et la demande – qui fixe la valeur marchande des travailleurs qualifiés.

Notes de bas de page

1     Pour comparer les provinces canadiennes les unes par rapport aux autres, nous avons d’abord déterminé leur note moyenne et l’écart type des valeurs provinciales. L’écart type est la mesure de la variabilité qui existe à l’intérieur d’un ensemble de résultats. Si les résultats sont normalement répartis (c’est-à-dire que leur dispersion ne penche pas lourdement d’un côté ou de l’autre ou qu’elle ne comporte pas d’aberrations importantes), environ 68 % des résultats se trouveront à un écart type au-dessus ou en dessous de la moyenne. Toute province qui se situe à un écart type au-dessus de la moyenne est dite « supérieure à la moyenne ». Les provinces qui se situent à un écart type en dessous de la moyenne sont dites « inférieures à la moyenne ». Les autres provinces ont un rendement qui les situe « dans la moyenne ».

2    Fédération des cégeps, Quelques chiffres (consulté le 6 mars 2014).

3    Marlyn Chisholm, Going for Gold : Boosting Educational Attainment in Western Canada, Calgary, Canada West Foundation, 2009.

4    Mary Allen et Chantal Vaillancourt, Promotion de 2000 : profil des diplômés du postsecondaire et endettement des étudiants, no 81-595-MIF au catalogue no 16, Ottawa, Statistique Canada, 2004.

5    Justin Bayard et Edith Greenlee, L’obtention d’un diplôme au Canada : profil, situation sur le marché du travail et endettement des diplômés de la promotion de 2005, no 81-595-M au catalogue no 74, Ottawa, Statistique Canada, 2009.

6    Alan Stark, Which Fields Pay, Which Fields Don’t? An Examination of the Returns to University Education in Canada by Detailed Field of Study, Ottawa, ministère des Finances Canada, février 2007.

7    Brahim Boudarbat, Earnings and Community College Field of Study Choice in Canada, document de travail, Bonn, Institute for the Study of Labour, mai 2004.