Écart entre les sexes dans l’enseignement supérieur

Messages clés

  • L’Ontario est la province canadienne où l’écart entre les sexes est le moindre, ce qui lui vaut un « B ».
  • C’est dans les provinces de l’Ouest que l’écart entre les sexes est le plus marqué, l’Alberta obtenant un « D » et la Saskatchewan un « D- ».
  • L’écart entre les sexes varie avec le niveau d’instruction; au Canada, les femmes sont beaucoup plus susceptibles d’obtenir un diplôme d’études supérieures, tandis que les hommes sont plus susceptibles d’avoir suivi un apprentissage ou d’être titulaires d’un doctorat.

L’écart entre les sexes dans l’enseignement supérieur canadien mis en contexte

Depuis quelques années, d’aucuns se déclarent préoccupés par l’écart qui se creuse entre les sexes dans l’enseignement canadien. Il y a tout juste 20 ans, les femmes étaient moins nombreuses que les hommes à faire des études supérieures, et un des grands défis était de rendre l’enseignement supérieur plus accessible et plus accueillant pour les femmes. Ce défi persiste dans certaines disciplines des mathématiques, de l’informatique et du génie, mais globalement, le déséquilibre entre les sexes a penché en faveur des femmes dans ce pays au début des années 19901.

Beaucoup se demandent si l’on ne se trouve pas confronté à une « crise chez les garçons » en éducation et quelle serait la solution à ce problème. En fait, on constate dans tous les pays de l’OCDE une « crise chez les garçons », le problème commençant bien avant que les élèves arrivent à l’université ou au collège. Selon un récent rapport, [traduction] « les garçons se classent globalement derrière les filles dans presque toutes les mesures de la réussite scolaire » – y compris en lecture et en écriture – et ils sont [traduction] « également plus susceptibles de se faire remarquer pour des problèmes de comportement, de redoubler une année et d’abandonner complètement l’école2 ».

Comment calcule-t-on cet indicateur?

L’écart entre les sexes dans l’enseignement supérieur se calcule en définissant d’abord un indice de l’égalité des sexes (colonne C du tableau) qui divise le ratio hommes-femmes détentrices d’un diplôme d’études supérieures (colonne A) par le ratio hommes-femmes dans la population (colonne B). Si les deux ratios sont égaux, l’indice de l’égalité des sexes est égal à un. Si le ratio hommes-femmes ayant achevé des études supérieures est supérieur au ratio hommes-femmes dans la population, l’indice est supérieur à un. L’indice est inférieur à un si le ratio hommes-femmes qui possèdent un diplôme d’études supérieures est inférieur au ratio hommes-femmes dans la population.

Pour toutes les provinces, et pour le Canada dans son ensemble, l’indice calculé est inférieur à un. Cela signifie que le ratio hommes-femmes diplômés de l’enseignement supérieur est inférieur au ratio hommes-femmes dans la population globale. Autrement dit, les femmes sont proportionnellement plus nombreuses à détenir un diplôme d’études supérieures que leur pourcentage dans la population le laisserait supposer.

Prenons, par exemple, la Saskatchewan. Le ratio hommes-femmes qui possèdent un diplôme d’études supérieures y est de 0,60, ce qui veut dire que pour 100 femmes diplômées de l’enseignement supérieur, seuls 60 hommes en sont également diplômés. Pourtant, les hommes sont plus nombreux que les femmes dans cette province – pour 100 femmes, il y a 101 hommes. Si l’on divise le premier ratio (0,60) par le second (1,01), on obtient une valeur d’indice de 0,59. Cela veut dire que la proportion d’hommes diplômés de l’enseignement supérieur est inférieure à leur part relative de la population. Plus la valeur de l’indice s’éloigne de 1, plus le déséquilibre est grand entre les sexes dans la province en matière d’enseignement supérieur. Le tableau révèle que c’est en Saskatchewan que ce déséquilibre est le plus grand et en Ontario qu’il l’est le moins.

L’écart entre les sexes est ensuite calculé en soustrayant de 1 la valeur de l’indice et en prenant la valeur absolue de cette différence. L’« écart entre les sexes » qui en résulte figure à la colonne E. En fait, dans les provinces ou pays dont l’écart entre les sexes est plus proche de zéro, l’équilibre est plus grand dans l’enseignement supérieur.

Au Canada et dans les provinces, l’écart entre les sexes est favorable aux femmes. C’est aussi le cas dans la plupart des pays comparables au Canada, sauf en Autriche, en Allemagne, au Japon, aux Pays-Bas et en Suisse. Dans ces cinq pays, la proportion d’hommes par rapport aux femmes dans l’enseignement supérieur est plus grande que dans la population totale. Cela signifie que la valeur de l’indice calculée à la colonne C du tableau ci-dessous est supérieure à 1 et qu’en la soustrayant de 1, on obtient un nombre négatif à la colonne D. Autrement dit, le déséquilibre entre les sexes penche en faveur des hommes dans ces pays. Comme nous ne voulons pas faire la distinction entre les déséquilibres favorables aux hommes ou aux femmes, nous calculons la valeur absolue de la colonne D. L’écart entre les sexes qui en résulte figure à la colonne E.

Le meilleur résultat à cet indicateur est d’obtenir un indice de l’égalité des sexes de 1, qui signifie qu’il n’y a pas de différence entre hommes et femmes. Un nombre plus élevé révèle un écart plus grand.

Pour calculer l’écart entre les sexes, on obtient auprès de l’OCDE les données relatives au nombre de diplômés de l’enseignement supérieur. L’OCDE utilise la Classification internationale type de l’éducation (CITE), qui exclut les programmes de formation technique et professionnelle. Or, l’exclusion de ces programmes a probablement pour effet de creuser l’écart entre les sexes en faveur des femmes. Cependant, on ne dispose pas actuellement de données comparables à l’échelle internationale pour vérifier cette hypothèse.

Où se situent les provinces en matière d’écart entre les sexes dans l’enseignement supérieur par rapport aux pays comparables?

Un écart entre les sexes dans l’enseignement supérieur est révélateur de l’existence de problèmes dans le système éducatif primaire et secondaire d’un pays. Tous les pays comparables au Canada présentent un déséquilibre plus ou moins grand entre les sexes dans l’enseignement supérieur, mais certains sont plus proches d’une répartition égale que d’autres. Quatre provinces canadiennes obtiennent une note respectable, à savoir un « B », et cinq décrochent un « C ». Seule une province se voit attribuer un « D- », la Saskatchewan, dont l’écart entre les sexes est plus important que celui du pays comparable au Canada le plus mal classé à cet indicateur.

Où se situent les provinces les unes par rapport aux autres?

En plus de classer les provinces par rapport à des pays comparables au Canada, nous les avons comparées entre elles et réparties selon trois catégories : « supérieure à la moyenne », « dans la moyenne » et « inférieure à la moyenne »3.

L’Ontario, dont l’écart est le plus petit, est considéré comme supérieur à la moyenne. Exception faite de la Nouvelle-Écosse, ce sont les provinces de l’Ouest qui obtiennent les plus mauvais résultats à cet indicateur. L’offre accrue, dans le secteur des ressources, d’emplois bien rémunérés n’exigeant pas d’études poussées peut tenter beaucoup d’hommes et les inciter à interrompre leurs études pour aller travailler.

Où se situe le groupe d’âge plus jeune?

En examinant l’écart entre les sexes dans l’enseignement supérieur pour toutes les personnes âgées de 25 à 64 ans, on obtient un important portrait du rendement global à long terme de chaque province. Mais il est tout aussi important de savoir comment un groupe d’âge plus jeune – celui des personnes âgées de 25 à 34 ans – s’en sort, car cela donne une meilleure idée des résultats plus récents du système.

Le niveau d’instruction a progressé pour les hommes comme pour les femmes dans cette tranche d’âge plus jeune. Toutefois, dans toutes les provinces, le nombre de femmes possédant un diplôme d’études supérieures augmente plus rapidement que celui des hommes. En conséquence, l’écart entre les sexes se creuse dans toutes les provinces.

Dans le groupe d’âge plus jeune, c’est encore en Ontario que l’écart est le plus mince, et l’Alberta et la Saskatchewan sont toujours en queue de peloton.

Qui fait mieux, les hommes ou les femmes?

Le sexe désavantagé dans l’équation varie selon le pays. Dans 5 des 16 pays comparables au Canada, les hommes âgés de 25 à 64 ans sont plus susceptibles que les femmes de la même tranche d’âge d’avoir fait des études supérieures. Il s’agit notamment du Japon et des Pays-Bas, tous deux très bien classés, où la balance penche légèrement en faveur des hommes; mais aussi de l’Autriche, de l’Allemagne et de la Suisse, dont les résultats laissent à désirer et où les hommes sont beaucoup plus susceptibles que les femmes d’avoir fait des études supérieures. Dans les onze autres pays, dont le Canada, le déséquilibre entre les sexes est favorable aux femmes.

Dans les dix provinces, le déséquilibre entre les sexes est favorable aux femmes. C’est en Saskatchewan qu’il est le plus important – pour 100 Canadiennes âgées de 25 à 64 ans qui possèdent un diplôme d’études supérieures, seulement 60 hommes sont également diplômés. C’est en Ontario que le déséquilibre est le moins marqué, 87 hommes ayant fait des études supérieures pour 100 femmes.

Il est important de garder à l’esprit que le collège et l’université n’offrent que deux types d’éducation parmi tant d’autres. En fait, le taux d’études supérieures plus faible chez les hommes tient sans doute en partie au fait qu’ils optent pour l’apprentissage et d’autres types de formation professionnelle pour accéder à des carrières lucratives. De plus, même si les femmes sont plus nombreuses globalement que les hommes à être diplômés de l’enseignement supérieur canadien, les hommes continuent de dominer dans beaucoup de domaines où les perspectives d’emploi et de revenu sont plus importantes pour les diplômés. Par exemple, les femmes sont plus susceptibles que les hommes de s’inscrire en lettres et sciences humaines, en sciences sociales et du comportement, et en éducation, alors que les hommes sont beaucoup plus susceptibles qu’elles de s’inscrire en ingénierie, en mathématiques et en informatique et sciences de l’information4.

Si l’on examine l’écart entre les sexes dans les provinces par type d’éducation, on voit se dégager des tendances distinctes. Dans toutes les provinces, les hommes sont beaucoup plus susceptibles d’avoir suivi un apprentissage. En Alberta, pour 100 femmes qui ont suivi un apprentissage, on compte 285 hommes âgés de 25-64 qui ont suivi ce type de formation. C’est au Québec que l’écart est le plus petit, soit 149 hommes pour 100 femmes. Au doctorat, les hommes devancent les femmes. À l’Î.-P.-É., pour 100 femmes titulaires d’un doctorat, on compte 242 hommes possédant le même titre. Là encore, c’est au Québec que le ratio est le plus faible, soit 156 hommes titulaires d’un doctorat pour 100 femmes.

En bref, il y a certes matière à s’inquiéter au sujet de l’écart entre les sexes dans l’enseignement supérieur canadien, mais le débat et les décisions devraient tenir compte des nombreuses variations sur le plan de la participation et des résultats par programme et par établissement, et de l’incidence du tout sur l’emploi et le revenu.

Si les provinces veulent améliorer l’équilibre entre les sexes dans l’enseignement supérieur, elles devront prendre des mesures pour améliorer les résultats des garçons à l’école primaire et secondaire et pour augmenter leurs taux de candidature, d’inscription et d’obtention de diplômes dans l’enseignement supérieur. Parallèlement, les provinces doivent continuer de s’efforcer de remédier aux déséquilibres entre les sexes dans certains domaines et programmes. Des mesures sur les deux fronts seront essentielles pour parvenir à une répartition plus équitable des possibilités et des réussites en matière d’éducation, le tout pouvant contribuer à la prospérité économique et au bien-être social.

Notes de bas de page

1    Martin Turcotte, Les femmes et l’éducation, produit n° 89-503-X au catalogue de Statistique Canada, Ottawa, Statistique Canada, 2011, p. 19.

2    Paul Cappon,