Société

Messages clés

  • Par rapport aux pays de comparaison, la moitié des provinces canadiennes obtiennent un « B » au bilan social comparatif. Elles se situent ainsi en milieu de peloton, le Nouveau-Brunswick occupant le 10e rang au classement général.
  • L’Alberta, la Nouvelle-Écosse, l’Île-du-Prince-Édouard, la Saskatchewan et Terre-Neuve-et-Labrador reçoivent un « C », Terre-Neuve-et-Labrador ne devançant que les pays les moins bien classés, soit la France, le Japon et les États-Unis.
  • Le Canada remporte un « B » et se classe au 10e rang parmi les 16 pays de comparaison.
  • Ce sont les pays nordiques, soit la Norvège, le Danemark et la Suède, qui obtiennent les meilleures notes.

La performance sociale mise en contexte

Le principal objectif du Conference Canada du Canada est de mesurer la qualité de vie au Canada dans son ensemble, dans ses provinces et territoires (lorsque des données comparables sont disponibles) ainsi que dans les pays semblables. La qualité de vie ne dépend pas seulement du niveau de vie, c’est-à-dire du revenu par habitant, mais elle est aussi le reflet de la situation sociale. Les inégalités et la pauvreté dans un pays ou une région ont d’importantes incidences sur la santé de la population, les résultats en matière d’éducation et la cohésion sociale. Par exemple, les faibles niveaux de participation et d’engagement civiques, les taux de criminalité élevés et les malaises sociaux sont tous associés à des niveaux plus élevés de pauvreté et d’inégalité.

Comment mesure-t-on la performance sociale?

Pour mesurer la performance sociale, nous évaluons le Canada, ses provinces de même que 15 pays comparables selon 10 indicateurs et leur attribuons des notes. Nous calculons ensuite une note globale pour chaque province et chaque pays en fonction de leur rendement global à ces 10 indicateurs. Pour avoir des renseignements détaillés sur la façon dont les notes ont été calculées, veuillez consulter la page Méthodologie.

Les territoires ne sont pas inclus dans ce bilan comparatif social, car les données ne sont pas disponibles pour les principaux indicateurs. Toutefois, le Conference Board du Canada publiera un rapport spécial de la série Les performances du Canada sur la situation sociale dans les territoires au printemps ou à l’été 2017.

Bien que l’analyse présentée dans ce bilan soit aussi conforme que possible aux bilans sociaux internationaux réalisés antérieurement, le choix des indicateurs a été limité par la disponibilité de données comparables pour les provinces et les pays analysés. Ainsi, les précédents bilans sociaux comportaient des indicateurs distincts pour la pauvreté des personnes âgées, la pauvreté des enfants et la pauvreté des adultes en âge de travailler. Malheureusement, il n’existe aucune donnée comparable pour les pays semblables au Canada et aux provinces canadiennes. Il existe cependant un indicateur global de la pauvreté.

Par ailleurs, il n’est pas possible de comparer les provinces et les pays semblables analysés dans ce bilan en ce qui concerne quatre indicateurs : la mobilité intergénérationnelle du revenu , l’écart salarial entre immigrants et Canadiens de naissance, l’écart salarial selon l’origine ethnique et le revenu des personnes ayant une incapacité. Ces indicateurs ne sont pas inclus dans le calcul des notes globales du bilan social.

De plus, des notes ne sont attribuées aux provinces que pour deux de ces quatre indicateurs. Aucune note ne leur est attribuée pour l’écart salarial selon l’origine ethnique, car leurs données sont plus anciennes que celles des autres indicateurs du bilan social. Il est cependant important de présenter des données sur les écarts salariaux selon l’origine ethnique pour comparer les inégalités de revenus liées à l’origine ethnique dans les différentes régions analysées. Aucune note n’est attribuée non plus pour ce qui est du revenu des personnes ayant une incapacité, à cause des écarts considérables entre les revenus des personnes handicapées et ceux des personnes sans incapacité, même pour la province la plus performante. Autrement dit, aucune province ne décroche un « A » pour cet indicateur. Si nous n’utilisons que les données provinciales pour calculer l’éventail des notes A, B, C et D, les trois premières provinces obtiennent des « A », selon la façon dont nous assignons les notes. Mais même la province la mieux classée à cet indicateur n’obtient pas de bons résultats. S’il était possible de classer les provinces par rapport aux pays de comparaison (en utilisant les données des pays comparés pour calculer l’éventail des notes A, B, C et D, comme c’est le cas pour les autres indicateurs pour lesquels des données internationales comparables sont disponibles), les résultats révèleraient probablement qu’aucune province ne mérite un « A ». Il n’était donc pas logique d’attribuer des notes A, B, C et D aux provinces pour cet indicateur en se basant uniquement sur des données provinciales, parce que même la province la plus performante n’était pas digne d’un « A » dans un contexte mondial.

Les 14 indicateurs du bilan social (10 indicateurs pour lesquels des données internationales et provinciales comparables sont disponibles et 4 pour lesquels seules les données provinciales sont disponibles) couvrent deux grandes catégories : l’équité et la cohésion sociale.

L’équité est évaluée en examinant la performance selon sept indicateurs : pauvreté, inégalité des revenus, mobilité intergénérationnelle du revenu (c.-à-d. la mesure dans laquelle les différences de revenu sont transmises d’une génération à l’autre), écart salarial entre les sexes, écart salarial entre immigrants et Canadiens de naissance, écart salarial selon l’origine ethnique et revenu des personnes ayant une incapacité.

Divers indicateurs sont utilisés pour évaluer la cohésion sociale. La participation électorale et les jeunes sans emploi (c.-à-d. la proportion de jeunes n’étant ni aux études ni au travail) mesurent le niveau de participation des gens à la vie de leur collectivité. La satisfaction de vivre et le soutien d’un réseau social (c’est-à-dire la proportion de personnes qui disent avoir des parents ou des amis sur lesquels ils peuvent compter pour obtenir de l’aide en cas de besoin) estiment la façon dont les gens perçoivent leur propre vie et leurs collectivités. Enfin, les taux d’homicide, de cambriolage et de suicide fournissent des informations sur l’état de dégradation de la vie communautaire.

Performance sociale

Équité Cohésion sociale
  • Pauvreté
  • Inégalité des revenus
  • Mobilité intergénérationnelle du revenu*
  • Écart salarial entre les sexes
  • Écart salarial entre immigrants et Canadiens de naissance*
  • Écart salarial selon l’origine ethnique*
  • Revenu des personnes ayant une incapacité*
  • Participation électorale
  • Jeunes sans emploi
  • Satisfaction de vivre
  • Soutien d’un réseau social
  • Homicides
  • Cambriolages
  • Suicides

*Ces indicateurs n’ont pas été inclus dans les calculs ayant servi à établir le classement général en matière de société, faute de données comparables disponibles dans les pays de comparaison.
Source : Le Conference Board du Canada.

Certains indicateurs contenus dans d’autres bilans comparatifs du Conference Board reflètent aussi la performance sociale. Par exemple, le taux de chômage dans le bilan de l’économie et le niveau d’achèvement des études secondaires dans le bilan de l’éducation et de compétences sont des mesures de la cohésion sociale. Le bilan de l’éducation et des compétences comporte également deux indicateurs évaluant l’équité : l’équité du rendement de l’apprentissage (mesurée par l’écart entre les résultats aux épreuves de mathématiques des étudiants nés au Canada et ceux des immigrants) et les élèves résilients (c.-à-d. les élèves qui font partie du quart inférieur sur le plan du statut socioéconomique dans une région ou un pays donné et dont les résultats aux épreuves normalisées de mathématiques se situent dans le quart supérieur tous pays confondus).

Où se situent les provinces dans le bilan social comparatif?

À quoi ressemble le bilan social comparatif global du Canada?

Globalement, le Canada obtient la note « B » et se classe au 10e rang parmi les 16 pays homologues. Il s’agit d’une baisse de rendement par rapport à notre précédent bilan national de 2013, dans lequel le Canada a également reçu un « B », mais s’était classé 7e parmi les pays comparables. Toutefois, ces notes ne peuvent se comparer, car les indicateurs du bilan social actuel ne sont pas les mêmes que ceux utilisés dans le précédent bilan. Quant aux indicateurs qui figurent à la fois dans le bilan de 2013 et le présent bilan, le rendement du Canada n’a pas changé de façon significative.

La note et le rang du Canada à l’indicateur des jeunes sans emploi demeurent les mêmes, soit un « B » et un 9e rang. En ce qui concerne l’indicateur de l’écart salarial entre les sexes, le Canada obtient toujours un « C », mais se classe au 13e rang parmi les 16 pays comparés, ce qui représente une baisse par rapport à la 10e place qu’il occupait en 2013. Si l’écart salarial entre les hommes et les femmes diminue au Canada, d’autres pays ont accompli de plus grands progrès à cet égard. En ce qui concerne l’inégalité des revenus, la note du Canada s’est améliorée, passant de « C » à « B », mais le pays se classe au 13e rang parmi les 16 nations comparables, soit une baisse par rapport à la 12e place qu’il occupait lors du dernier bilan comparatif.

Quant aux homicides, le Canada a cédé son « A » pour un « B », mais il a grimpé du 14e au 13e rang parmi les 16 pays de comparaison. De plus, le taux d’homicide au Canada est en baisse. Le Canada a nettement amélioré ses résultats à l’indicateur des cambriolages, passant d’un « B » à un « A » et bondissant de la 7e à la 4e place. Il faut mentionner que pour les deux indicateurs de la criminalité, on utilise maintenant les taux moyens sur trois ans plutôt que les taux de la dernière année pour laquelle des données sont disponibles. Ainsi, les données actuelles ne sont pas directement comparables à celles utilisées dans les rapports précédents.

En ce qui concerne les suicides, le Canada obtient toujours un « B », mais il est passé de la 7e à la 5e place parmi les 16 pays de comparaison. Pour évaluer le rendement, on compare – comme c’est le cas pour les indicateurs de la criminalité – les taux de suicide moyens sur trois ans plutôt que les données sur les taux de suicide de la dernière année.

La performance du Canada est exceptionnelle au chapitre de la satisfaction de vivre, où il obtient un « A » et se classe au 4e rang parmi ses pairs. Par contre, le Canada obtient sa plus mauvaise note, un « C », à trois indicateurs : pauvreté, écart salarial entre les sexes et participation électorale.


Quelles sont les provinces les mieux classées au bilan social comparatif?

Le Nouveau-Brunswick et le Québec sont les provinces qui obtiennent le meilleur rendement, obtenant chacune un « B » au classement général, ce qui les situe derrière les pays nordiques ainsi que les Pays-Bas, l’Allemagne, la Suisse, l’Australie et l’Autriche.

Le Nouveau-Brunswick se classe en 10e place parmi les 26 pays et provinces comparés. À l’instar du Québec, la province décroche des « A » à 3 des 10 indicateurs utilisés dans le cadre de ce bilan comparatif : homicides, cambriolages et inégalité des revenus, se classant même au 1er rang des provinces pour ce dernier indicateur. La province remporte en outre un « A+ » pour la satisfaction de vivre, délogeant ainsi le pays comparable le plus performant à cet égard, la Suisse. La province reçoit un « B » pour la participation électorale et un « C » aux autres indicateurs : pauvreté, écart salarial entre les sexes, jeunes sans emploi, soutien d’un réseau social et suicides.

Le Québec se classe juste derrière le Nouveau-Brunswick, se situant au 11e rang parmi les 26 pays et provinces de comparaison. La province décroche un « A » à 3 des 10 indicateurs utilisés pour calculer la note globale : homicides, cambriolages et satisfaction de vivre. Le Québec affiche le 2e taux d’homicide le plus bas au pays après Terre-Neuve-et-Labrador, une baisse significative de ce taux ayant été enregistrée en 2013 et 2014. Le Québec obtient un « B » à plusieurs indicateurs : l’inégalité des revenus, les jeunes sans emploi, le soutien d’un réseau social et les suicides. La province obtient ses plus faibles notes, trois « C », pour la pauvreté, l’écart salarial entre les sexes et la participation électorale. Le Québec avait le 2e plus bas taux de participation électorale aux élections fédérales de 2015, après Terre-Neuve-et-Labrador.

Bien que le Québec soit l’une des provinces les mieux cotées, ce ne serait peut-être pas le cas si des données internationales comparables avaient été disponibles pour certains des indicateurs de l’équité qui n’ont pas été pris en compte dans le calcul du bilan comparatif. Par rapport à d’autres provinces, le Québec ne fait pas bonne figure sur le plan de l’écart salarial entre immigrants et natifs, l’écart salarial selon l’origine ethnique et le revenu des personnes ayant une incapacité. En ce qui concerne l’écart salarial entre immigrants et Canadiens de naissance, le Québec obtient un « C », soit le 3e écart salarial le plus élevé après le Manitoba et la Saskatchewan. Le Québec a le plus grand écart salarial selon l’origine ethnique de toutes les provinces et se situe en avant-dernière position quant au revenu des personnes ayant une incapacité.


Quelles provinces se situent en milieu de peloton?

La Colombie-Britannique et l’Ontario obtiennent des « B » au bilan social comparatif, se classant respectivement au 12e et au 14e rang, leurs notes globales étant respectivement quelque peu supérieure et inférieure à la moyenne nationale.

La Colombie-Britannique affiche son meilleur rendement aux indicateurs de la satisfaction de vivre et du soutien d’un réseau social. En ce qui concerne ce dernier indicateur, la province occupe le 2e rang parmi tous les pays et régions de comparaison, après l’Irlande. La Colombie-Britannique obtient un « B » aux deux indicateurs de la criminalité, pour les jeunes sans emploi et les suicides. La province reçoit des « C » pour la pauvreté, la participation électorale et l’inégalité des revenus. En 2013, c’est en Colombie-Britannique que l’on trouvait la 2e plus grande inégalité des revenus parmi les provinces. La province écope d’un « D », sa plus faible note, pour son écart salarial entre les sexes, le 4e plus grand parmi les 26 pays et régions comparables.

Tout comme le Québec, l’Ontario décroche des « A » pour sa bonne performance quant aux taux d’homicide et de cambriolage ainsi que pour la satisfaction de vivre. La province a le taux de cambriolage le plus bas de toutes les provinces et pays comparés, avec une moyenne de moins de 300 cambriolages par tranche de 100 000 habitants. L’Ontario obtient également un « A » pour les suicides, affichant le 3e plus faible taux de suicide parmi toutes les provinces. La province se voit attribuer son unique « B » pour les jeunes sans emploi et, à l’instar de la Colombie-Britannique, obtient des « C » pour la pauvreté, l’inégalité des revenus et la participation électorale. La province reçoit également des « C » pour le soutien d’un réseau social et l’écart salarial entre les sexes.


Comment les provinces des Prairies s’en sortent-elles?

Le Manitoba se voit aussi attribuer globalement un « B » au bilan social comparatif. L’Alberta et la Saskatchewan obtiennent un « C » au classement général.

Le Manitoba est la province des Prairies la plus performante, occupant la 15e place au classement général, tout juste derrière la Belgique. La province remporte des « A » pour la satisfaction de vivre et le soutien d’un réseau social, ainsi que des « B » aux indicateurs de l’inégalité des revenus, de l’écart salarial entre les sexes, des jeunes sans emploi, des cambriolages et des suicides. En ce qui concerne la pauvreté et la participation électorale, le Manitoba obtient des « C ». C’est pour les homicides que la province écope de sa plus mauvaise note, soit un « D ». Après les États-Unis, le Manitoba a le taux d’homicide moyen le plus élevé sur trois ans parmi tous les pays et régions de comparaison. La province affiche également un piètre rendement à quelques indicateurs de l’équité non inclus dans le calcul du classement général. C’est notamment au Manitoba que l’on retrouve le plus grand écart salarial entre immigrants et Canadiens de naissance. De fait, le salaire horaire médian des immigrants reçus est inférieur de 39 % à celui des citoyens canadiens nés dans la province. En ce qui concerne la mobilité intergénérationnelle du revenu, le Manitoba ne s’en sort pas mieux, se classant au dernier rang parmi les provinces et territoires canadiens, avec une mobilité de revenu deux fois inférieure à celle de la province arrivant en tête à cet égard, l’Île-du-Prince-Édouard.

L’Alberta arrive 19e au classement général, tout juste derrière l’Irlande. La province reçoit ses meilleures notes, des « A », pour la pauvreté et la satisfaction de vivre. L’Alberta a le taux de pauvreté le plus bas parmi toutes les provinces et le 3e plus faible parmi les 26 pays et régions de comparaison, après le Danemark et la Finlande. Ces résultats proviennent toutefois de données datant de 2013 – avant l’effondrement des prix des produits de base – et ils reflètent la performance provinciale d’avant la récession. Ainsi, lorsque des données plus actuelles seront disponibles, il pourrait y avoir une certaine dégradation et un recul potentiel de la province dans le classement général.

L’Alberta obtient des « B » pour l’inégalité des revenus, les jeunes sans emploi, les cambriolages et les suicides et des « C » en ce qui concerne la participation électorale et les homicides. La province reçoit ses plus faibles notes, soit deux « D », aux indicateurs du soutien d’un réseau social et de l’écart salarial entre les sexes. L’Alberta affiche le 3e plus grand écart salarial entre les hommes et les femmes dans toutes les administrations comparées : seuls le Japon et Terre-Neuve-et-Labrador font pire. La province se classe aussi mal quant au revenu des personnes ayant une incapacité, un indicateur qui ne figure pas dans le bilan social comparatif global. En Alberta, les personnes ayant une incapacité gagnent 66 % du revenu des personnes sans incapacité, ce qui est le pire rendement de toutes les provinces.

La Saskatchewan, la province des Prairies qui affiche les pires résultats sur le plan social, arrive au 21e rang. Elle écope d’un « D » à l’indicateur de l’écart salarial entre les sexes et d’un « D− » à celui du soutien d’un réseau social, pour lequel elle se classe derrière le pays de comparaison le moins performant à cette mesure, le Japon. La Saskatchewan obtient un « C » pour les homicides, avec le 3e taux d’homicide moyen le plus élevé parmi tous les pays et régions de comparaison, après les États-Unis et le Manitoba. La province s’en sort également mal à certains indicateurs qui ne figurent pas dans le classement général. La Saskatchewan obtient un « D » par rapport aux autres provinces en ce qui concerne l’écart salarial entre les immigrants et les Canadiens de naissance, ayant le 2e écart salarial le plus élevé après le Manitoba. La Saskatchewan se classe également en dessous de la moyenne nationale quant à la mobilité intergénérationnelle du revenu.

La Saskatchewan recueille des « B » aux indicateurs de la pauvreté, de l’inégalité des revenus, de la participation électorale, des cambriolages et des suicides, mais a un bon rendement au chapitre des jeunes sans emploi, se situant globalement en 4e position. Avec un taux de jeunes sans emploi de seulement 11 %, la Saskatchewan est la province la mieux classée et la seule qui décroche un « A » à cet égard. La Saskatchewan remporte sa meilleure note, un « A+ », pour la satisfaction de vivre, ce qui la situe en 1re place parmi les pays et régions comparés.


Quel est le rendement des provinces de l’Atlantique?

Alors que le Nouveau-Brunswick obtient globalement un « B » et une respectable 10e place, les autres provinces de l’Atlantique ne s’en sortent pas aussi bien, se classant presque en queue de peloton et recueillant des « C » au bilan social comparatif.

La Nouvelle-Écosse se situe au 20e rang du classement général, même si elle affiche de bons résultats à plusieurs indicateurs de la cohésion sociale : elle obtient des « A » en ce qui concerne les homicides, les cambriolages et la satisfaction de vivre. La province reçoit des « B » pour les suicides et l’inégalité des revenus et des « C » quant à la pauvreté, l’écart salarial entre les sexes, la participation électorale et le soutien d’un réseau social. C’est pour l’indicateur des jeunes sans emploi que la Nouvelle-Écosse réalise sa pire performance, avec un « D » : elle enregistre le plus haut taux de chômage parmi toutes les provinces et le 2e plus élevé de toutes les administrations comparées, après l’Irlande. En 2012, 21 % de la population de la province âgée de 20 à 24 ans n’était ni aux études ni au travail.

La Nouvelle-Écosse obtient de bons résultats aux indicateurs de l’équité qui ne sont pas inclus dans le calcul du classement général. Avec un écart salarial de 2,8 % entre les immigrants et les Canadiens de naissance, la Nouvelle-Écosse affiche la plus petite différence entre les salaires horaires médians des immigrants reçus titulaires d’un diplôme universitaire et les citoyens nés au Canada. La province a aussi le plus faible écart salarial selon l’origine ethnique de toutes les provinces.

L’Île-du-Prince-Édouard (Î.-P.-É.) se classe tout juste derrière la Nouvelle-Écosse et la Saskatchewan, soit à la 22e place. Comme la Nouvelle-Écosse, l’Î.-P.-É. s’en sort bien à un certain nombre d’indicateurs de la cohésion sociale, méritant des « A » en ce qui concerne les homicides, les cambriolages et les suicides, et un « À+ » pour la satisfaction de vivre. La province a le 2e plus faible taux de suicide après le Royaume-Uni et se classe parmi les cinq premiers en ce qui a trait aux cambriolages, avec l’un des plus bas taux. L’Î.-P.-É. décroche également un « A » à un indicateur de l’équité : l’inégalité des revenus. La province enregistre le 4e plus mince écart salarial entre les sexes parmi les 26 pays et régions de comparaison, après la Belgique, le Danemark et la Norvège, obtenant un « B » à cet indicateur. L’Î.-P.-É. récolte aussi un « B » pour ce qui est de la participation électorale, se classant derrière six pays de comparaison, mais affichant la plus forte participation électorale de toutes les provinces.

La performance globale de l’Î.-P.-É. est tirée vers le bas par ses résultats à trois indicateurs : la pauvreté, les jeunes sans emploi et le soutien d’un réseau social. La province obtient des « C » en ce qui concerne la pauvreté et les jeunes sans emploi. En 2013, elle affichait le taux de pauvreté le plus élevé parmi les provinces et en 2014, le troisième taux de chômage en importance chez les jeunes, soit 18 %. Quant à la perception du soutien d’un réseau social, l’Î.-P.-É. se classe au dernier rang parmi tous les pays et régions de comparaison et écope ainsi d’un « D− » à ce titre.

Comme la Nouvelle-Écosse, l’Î.-P.-É. fait bonne figure aux indicateurs de l’équité qui ne sont pas inclus dans le calcul du classement général. La province a la plus forte mobilité intergénérationnelle du revenu de toutes les provinces et le 2e plus faible écart salarial selon l’origine ethnique, après la Nouvelle-Écosse.

Arrivant en 23e position parmi les 26 pays et provinces comparés, Terre-Neuve-et-Labrador se situe en queue de peloton, ne devançant que la France, le Japon et les États-Unis. La province écope d’un « D− » pour son écart salarial entre les sexes, le plus élevé parmi tous les pays et régions de comparaison. À Terre-Neuve-et-Labrador, l’écart entre les gains hebdomadaires à temps plein des hommes et des femmes est de près de 30 %, un taux près de trois fois plus élevé que celui de la province la mieux classée à cet égard, l’Île-du-Prince-Édouard. Terre-Neuve-et-Labrador s’en sort aussi mal quant aux jeunes sans emploi et au soutien d’un réseau social, recevant des « D » pour ces deux indicateurs. La province affiche le 3e plus fort taux de chômage, après l’Irlande et la Nouvelle-Écosse. Terre-Neuve-et-Labrador obtient un « C » pour ce qui est de la pauvreté et de la participation électorale, ayant enregistré le plus faible taux de participation électorale parmi les provinces lors de la dernière élection fédérale. La province reçoit des « B » quant à l’inégalité des revenus, aux cambriolages et aux suicides. Terre-Neuve-et-Labrador obtient de bons résultats à deux indicateurs : les homicides et la satisfaction de vivre. La province remporte un « A » pour les homicides, avec le taux d’homicide moyen sur trois ans le plus bas au pays. En ce qui concerne la satisfaction de vivre, Terre-Neuve-et-Labrador décroche un « A+ », se classant au 2e rang derrière la Saskatchewan.

À l’instar des autres provinces de l’Atlantique, Terre-Neuve-et-Labrador s’en sort bien aux indicateurs de l’équité qui ne figurent pas dans le classement général. La province affiche la 3e plus grande mobilité intergénérationnelle après l’Î.-P.-É. et la Colombie-Britannique, le 2e plus mince écart salarial entre immigrants et Canadiens de naissance parmi toutes les provinces, et le 3e plus faible écart salarial selon l’origine ethnique.


Comment les territoires s’en sortent-ils?

Nous n’incluons pas les territoires dans nos calculs aux fins des comparaisons provinciales et internationales, car les données ne sont pas disponibles pour plusieurs indicateurs du bilan social comparatif. Cependant, le Conference Board entend inclure les territoires dans son analyse et fournit donc des renseignements sur leur performance quand des données sont disponibles.

Équité

Écart salarial entre les sexes : Le Nunavut et le Yukon affichent de bons résultats à l’indicateur de l’écart salarial entre les sexes. Le Nunavut décroche un « A + », avec un écart salarial plus faible que le pays de comparaison qui classe en tête, la Belgique. Le Yukon obtient un « A ». De leur côté, les Territoires du Nord-Ouest (T. N.-O.) ne reçoivent qu’un « D », avec un écart salarial entre les hommes et les femmes de 23 %.

Mobilité intergénérationnelle du revenu : Comme la plupart des provinces, les territoires s’en tirent bien à l’indicateur de la mobilité intergénérationnelle du revenu. Il n’existe pas de données distinctes pour les T. N.-O. et le Nunavut; cependant, ces territoires remportent globalement un « A », de même que le Yukon.

Revenu des personnes ayant une incapacité : Aucune note n’est attribuée aux pays ou régions de comparaison, puisqu’aucune donnée internationale comparable n’est disponible et qu’aucune province n’affiche un excellent rendement à ce chapitre – c.-à-d. que le classement des provinces les unes par rapport aux autres n’était pas logique vu qu’aucune d’entre elles ne décrochait un « A ». Néanmoins, le Nunavut et le Yukon s’en sortent mieux à cet égard que la province la plus performante, le Manitoba. Au Nunavut, le revenu des personnes ayant une incapacité est en fait équivalent à 92,7 % de celui des personnes sans incapacité. Le rendement du Nunavut est donc supérieur de 16 points de pourcentage à celui de la province la plus performante à cet égard, le Manitoba (76,5 %), tandis que le Yukon le devance légèrement (76,9 %). Mais les T. N.-O. s’en sortent mal à cet indicateur. Le revenu des personnes ayant une incapacité dans les T. N.-O. n’équivaut qu’à 57,6 % de celui des personnes sans incapacité, ce qui en fait la juridiction canadienne la moins performante à ce chapitre.

Cohésion sociale

Participation électorale : Le Yukon récolte un « B », tandis que les T. N.-O. – qui reçoivent un « C », se situent tout juste devant la province la moins bien classée à cet égard, soit Terre-Neuve-et-Labrador. Le Nunavut, qui écope d’un « D », a le taux de participation le plus faible de toutes les administrations canadiennes.

Jeunes sans emploi : Le Yukon obtient un « B » à cet indicateur. Les T. N.-O. et le Nunavut, par contre, affichent les taux de chômage les plus élevés parmi tous les pays et régions de comparaison, récoltant ainsi un « D− ».

Homicides : Les taux d’homicide des trois territoires sont élevés par rapport aux autres juridictions comparées. Le Yukon se voit attribuer un « D ». Les T. N.-O. et le Nunavut écopent chacun d’un « D− » pour leurs taux d’homicide, qui sont les plus élevés de tous les pays et régions de comparaison.

Cambriolages : Le taux de cambriolage au Yukon, qui obtient un « B » à ce chapitre, est plus haut que la moyenne nationale, mais demeure relativement faible comparativement aux taux de la plupart des pays comparés. Les T. N.-O. et le Nunavut, qui reçoivent respectivement des « C » et « D », ont les taux de cambriolage les plus élevés au Canada.

Satisfaction de vivre : Méritant un « A + », le Nunavut est le territoire le plus performant au chapitre de la satisfaction de vivre et surpasse tous les pays ou régions comparables à cet égard. Le Yukon décroche un « A », tandis que les T. N.-O. se retrouvent avec un « B ».

Suicides : Le Yukon et les T. N.-O. se voient tous deux attribuer des « C » à cet égard, ayant des taux moyens de suicide plus élevés que celui de la province la mieux classée, le Nouveau-Brunswick. Avec le plus fort taux de suicide parmi tous les territoires, le Nunavut écope d’un « D− ».

Les données territoriales ne sont pas disponibles pour les indicateurs de l’inégalité des revenus et de la pauvreté. Aucune note n’a par ailleurs été attribuée aux territoires en ce qui concerne les indicateurs de l’écart salarial entre immigrants et Canadiens de naissance et l’écart salarial selon l’origine ethnique.

Le Conference Board publiera un rapport spécial de la série Les performances du Canada portant sur le rendement social des territoires. Ce rapport devrait être publié au printemps ou à l’été 2017.

Quels sont les principaux problèmes sociaux auxquels est confronté le Canada?

Le Canada obtient globalement « B » au bilan social comparatif, se classant au 10e rang parmi 16 pays comparables. Ce n’est pas une mauvaise performance en soi, mais il y a certainement place à l’amélioration. La lutte contre l’inégalité des revenus et la pauvreté est l’un des principaux défis que le Canada et plusieurs pays comparables doivent relever. Le Canada récolte un « C » à l’indicateur de la pauvreté, se classant au 13e rang parmi les pays comparables à ce chapitre. Le pays fait mieux quant à l’inégalité des revenus, remportant un « B » à cet indicateur, ce qui le situe au 13e rang parmi les 16 pays comparables – un rendement nettement moins impressionnant. Selon le rapport Global Risks Report 2017 du Forum économique mondial, « la disparité croissante des revenus et de la richesse » est la tendance la plus susceptible de déterminer l’évolution du monde au cours des 10 prochaines années.

Les surprenants résultats à deux grands rendez-vous électoraux tenus en 2016, soit le vote de la population du Royaume-Uni en faveur du Brexit – pour quitter l’Union européenne –, et l’élection de Donald Trump à la présidence des États-Unis, mettent en évidence les problèmes sociaux suscités par les inégalités croissantes. Au Royaume-Uni et aux États-Unis, les disparités de revenus sont beaucoup plus prononcées qu’au Canada, ce qui semble générer une plus grande polarisation sociale. Cependant, le Canada ne peut se permettre d’être complaisant.

L’inégalité des revenus (mesurée par le coefficient de Gini) au Canada a augmenté depuis la fin des années 1970. De plus, la part des revenus des plus riches (décile supérieur ou les 10 % les plus élevés) a augmenté de façon notable de la fin des années 1980 jusqu’au début des années 2000, pendant que la part revenant au décile inférieur diminuait1. Selon les dernières données disponibles, les revenus perçus par le décile supérieur au Canada sont neuf fois plus élevés que les revenus perçus par le décile inférieur.

Depuis 2000, l’augmentation de la part des 10 % les plus riches a été légèrement moins rapide et le coefficient de Gini est demeuré relativement stable, de sorte que le Canada dans son ensemble n’a pas été affecté par les inégalités croissantes accompagnant la mondialisation galopante et les progrès technologiques. Mais cela est en grande partie attribuable à l’économie canadienne jadis florissante des ressources naturelles ainsi qu’au boom immobilier qui a généré la création de nombreux postes semi-spécialisés. La fin du boom des ressources signifie que les emplois bien rémunérés dans ce secteur d’activité ne peuvent plus pallier les faiblesses d’autres industries, en particulier celles du secteur manufacturier. En outre, l’immobilier ne peut pas continuer à être un moteur de la croissance économique. Ainsi, si l’on exclut l’intervention des pouvoirs publics, l’inégalité des revenus au Canada pourrait recommencer à croître.

L’inégalité des revenus façonne les perspectives d’emplois qui, à leur tour, affectent la mobilité intergénérationnelle du revenu, ou la mesure dans laquelle les différences de revenus se transmettent d’une génération à l’autre. Comme l’explique Miles Corak, professeur d’économie à l’Université d’Ottawa et chercheur de pointe sur la mobilité intergénérationnelle du revenu, « tout ce qui suscite les inégalités réduit la mobilité, car cela modifie à la fois les possibilités pour les familles d’investir dans leurs enfants et d’être incités à le faire2» [traduction]. Le Canada affiche de bons résultats quant à la mobilité intergénérationnelle du revenu. Par rapport aux pays comparables, le Canada offre ainsi une grande mobilité et décroche ainsi un « A ». En revanche, les États-Unis et le Royaume-Uni ont la plus faible mobilité intergénérationnelle du revenu parmi les pays et régions comparés.

Cela signifie-t-il que le Canada ne doit pas s’inquiéter des fortes inégalités de revenus tant qu’il affiche une bonne mobilité intergénérationnelle du revenu? Pas vraiment. Les Canadiens ont la chance d’avoir de bons résultats en matière d’éducation et de faire preuve de moins de ségrégation sociale que leur voisin du Sud, ce qui contribue à la mobilité du revenu. Cependant, la persistance des revenus élevés est beaucoup plus forte pour les Canadiens qui grandissent dans un foyer situé dans les tranches de revenu supérieures – la mobilité du revenu de ceux qui font partie du premier 1 % est deux fois moins grande que pour ceux faisant partie des 2 % inférieurs3. C’est une bonne chose en ce sens que les enfants qui grandissent dans les ménages à faible revenu sont plus susceptibles de migrer vers une tranche de revenu plus élevée, une fois devenus adultes. Ce qui est également suggéré, par contre, c’est que les enfants qui ont des revenus élevés en grandissant sont plus susceptibles de provenir de familles dont le père a un haut revenu – la mobilité des revenus étant généralement calculée en utilisant des données sur les gains du père ou du fils. Ainsi, dans un contexte de hausse des inégalités de revenus et de plus forte concentration des revenus dans la catégorie des 1 % les plus riches, les personnes à faible revenu ont éventuellement moins de possibilités d’aller plus loin dans l’échelle des revenus – autrement dit, moins de mobilité du revenu et plus de persistance de la pauvreté.

Parmi les pays et régions comparables, le Canada affiche le 4e taux de pauvreté le plus élevé, selon les mesures de faible revenu4 – seuls les États-Unis, le Japon et l’Australie ont de pires résultats à ce chapitre. Et alors que le taux de pauvreté de la population totale au Canada est demeuré plus ou moins stable au cours des dernières décennies, celui des personnes âgées est en hausse. En outre, le bilan du Canada en matière de pauvreté chez les enfants est maigre : en 2013, dernière année pour laquelle il existe des données internationales comparables, le Canada affichait le 2e taux de pauvreté chez les enfants parmi les 16 pays comparés, après les États-Unis.

Certains groupes sont plus exposés à un risque de pauvreté que d’autres. Les femmes, notamment les mères de familles monoparentales et les femmes âgées seules, sont davantage touchées par la pauvreté. Au Canada, pour les personnes âgées de 65 ans et plus, le taux de pauvreté était en 2014 de 14,4 % pour les femmes et de 10,3 % pour les hommes, soit une différence d’un peu plus de 4 points de pourcentage5. Les enfants élevés dans des familles monoparentales ayant une femme à leur tête sont particulièrement vulnérables : le taux de pauvreté chez les enfants de moins de 18 ans dans les familles monoparentales dirigées par des femmes était de 45 %6. Les personnes handicapées, les Autochtones, les minorités visibles et les immigrants récemment admis sont également touchés de façon disproportionnée par la pauvreté. Ce serait donc un bon début que de trouver des façons d’augmenter les taux de participation à la vie active et les revenus des personnes ayant une incapacité, ainsi que de réduire l’écart salarial entre les sexes, l’écart salarial entre immigrants et Canadiens de naissance, et l’écart salarial selon l’origine ethnique.

Le Canada recueille un « C » à l’indicateur de l’écart salarial entre les sexes, occupant la 13e place parmi les 16 pays comparables. L’écart entre la rémunération médiane hebdomadaire des hommes et celle des femmes au Canada est de 18 %. Si l’on examine l’écart salarial quant à la rémunération horaire (qui exclut tout renseignement sur le nombre d’heures travaillées et reflète mieux la rémunération réelle pour le travail accompli), l’écart salarial est plus faible, mais toujours élevé à un peu plus de 12 %.

Bien qu’il n’existe pas de données internationales comparables sur l’écart salarial entre les immigrants et les Canadiens de naissance, sur l’écart salarial selon l’origine ethnique et sur le revenu des personnes ayant une incapacité, les données pour le Canada révèlent que le pays doit faire mieux sur ces aspects. La différence de pourcentage entre les salaires horaires médians des immigrants reçus et ceux des citoyens nés au Canada est d’un peu plus de 20 %. D’après les données sur l’écart salarial selon l’origine ethnique, la différence entre les salaires et traitements médians annuels des détenteurs d’un diplôme universitaire de race blanche et ceux de minorités visibles est de 13 %. L’indicateur du revenu des personnes ayant une incapacité reflète la persistance du sous-emploi et du chômage chez les personnes handicapées au Canada. Le revenu des personnes ayant une incapacité au Canada est l’équivalent de 73 % de celui des personnes sans incapacité. Nous ne nous sommes pas encore penchés sur les taux de pauvreté dans la population autochtone et l’écart salarial entre les Autochtones et les non-Autochtones au Canada, mais le rapport des Performances du Canada qui sera publié au cours de l’année sur le rendement social des territoires ne révèlera probablement pas une situation plus édifiante.

Les inégalités de revenus et la pauvreté – particulièrement chez les populations défavorisées – sont des enjeux cruciaux auxquels le Canada est confronté. Elles affectent les résultats en matière de santé et d’éducation de même que la cohésion sociale, en faisant grimper les taux de criminalité et en accroissant la discrimination et l’exclusion sociale. La croissance économique peut également être ralentie par de grandes disparités de revenus si ces écarts signifient que le pays ou la région n’utilise pas pleinement les compétences et les capacités de tous ses citoyens.

Que peut-on faire pour réduire l’inégalité des revenus et la pauvreté?

Le fait de se concentrer sur les éléments suivants permettra de lutter contre l’inégalité des revenus et la pauvreté globale de la population :

  1. revoir le rôle de l’impôt sur le revenu des particuliers et des transferts gouvernementaux;
  2. améliorer les résultats en matière d’éducation, en mettant l’accent sur l’apprentissage préscolaire ainsi que sur la formation continue et le perfectionnement des compétences;
  3. s’attaquer à la pauvreté des enfants;
  4. cibler les inégalités auxquelles font face les groupes défavorisés et s’efforcer de combler les écarts salariaux.

Les impôts sur le revenu des particuliers et les transferts gouvernementaux (comme l’aide sociale, l’assurance-chômage, la sécurité de la vieillesse et les allocations familiales) jouent un rôle important dans la réduction des inégalités de revenus et de la pauvreté. Selon des données datant de 2014, le régime fiscal et de transferts du Canada a réduit les inégalités de 27 % : le coefficient de Gini est passé de 0,440 à 0,322 après impôts et transferts. Mais aujourd’hui, le régime fiscal et de transferts canadien ne réduit plus le coefficient de Gini autant qu’il l’a fait dans les années 1980 et au début des années 19907.

L’affaiblissement de l’effet redistributif des impôts et des transferts est plus évident lorsqu’on examine les déciles de revenu. Au milieu des années 1990, les impôts et transferts au Canada ont réduit de 35 % la différence entre le ratio de la part du revenu du décile supérieur et celui du décile inférieur. En 2014, les impôts et transferts ont réduit ce ratio de seulement 8 %8. Les changements apportés au budget fédéral de 2016, à savoir la nouvelle fourchette d’imposition des hauts revenus et les taux d’imposition réduits pour les personnes de la classe moyenne, accroîtront probablement la redistribution du revenu. Toutefois, l’ampleur des incidences globales sur l’inégalité des revenus sera probablement modeste.

Il y a au Canada un intérêt grandissant pour la garantie d’un revenu de base (aussi appelé revenu annuel garanti) afin de réduire la pauvreté et l’inégalité des revenus. La Finlande et les Pays-Bas ont mis en place des programmes pilotes de revenu de base, dans lesquels les résidents reçoivent chaque année une somme inconditionnelle. L’Ontario et l’Î.-P.-É. mettront bientôt en œuvre des projets pilotes de revenu de base9. Bien qu’une garantie de revenu de base puisse avoir un effet considérable sur les taux de pauvreté, il s’agit d’un effort coûteux. En outre, ses détracteurs estiment qu’un revenu annuel garanti peut dissuader de travailler ou remplacer d’autres programmes sociaux importants.

L’amélioration des résultats en matière d’éducation profite à tous les membres de la société. L’éducation est la clé de la mobilité sociale ascendante. Le niveau d’éducation de l’enfant, tout comme celui de ses parents, a un effet significatif sur la persistance du revenu entre les générations. En fait, l’éducation des parents est l’un des principaux déterminants, car le niveau de scolarité tend à persister d’une génération à l’autre10. Mettre l’accent sur l’éducation à la petite enfance est donc particulièrement important : les enfants défavorisés doivent avoir accès à des programmes d’éducation préscolaire de bonne qualité.

Ceux qui grandissent dans des ménages à faible revenu doivent également avoir accès à des soins de santé de qualité, parce que leur état de santé et, par conséquent, leur développement et leur instruction sont affectés par une mauvaise alimentation et un logement insalubre. Il faut s’attaquer à la pauvreté chez les enfants pour résoudre adéquatement les problèmes de mobilité et d’inégalité des revenus, et briser ainsi le cycle des faibles revenus. Sur une note prometteuse, la nouvelle Allocation canadienne pour enfants du gouvernement fédéral prévoit jusqu’à 6 400 $ par année pour les enfants admissibles de moins de six ans et de 5 400 $ par année pour les enfants admissibles âgés de 6 à 17 ans11.

En ce qui concerne l’éducation et les compétences, il faut également mettre l’accent sur la formation continue et le perfectionnement des compétences. En réalité, de nombreux emplois ont été délocalisés ou déplacés par la mondialisation et les progrès technologiques, et ils continueront de l’être. Il est donc impératif de veiller à ce que la main-d’œuvre canadienne puisse répondre aux exigences en constante évolution du marché de travail.

Certains groupes sont affectés de façon disproportionnée par la pauvreté. Il est donc primordial de remédier aux inégalités auxquelles sont confrontés les groupes défavorisés. En réponse à une lettre rédigée par l’organisation de défense des droits One, le premier ministre Justin Trudeau a écrit en 2016 : « Je suis tout à fait d’accord : la pauvreté est sexiste. Les femmes et les filles sont moins susceptibles d’être éduquées, plus susceptibles d’être appauvries, et courent un risque accru d’être malades et en mauvaise santé12 ».

Trouver des façons d’améliorer les perspectives de carrière des femmes et aider à combler l’écart salarial entre les sexes contribueraient largement à réduire la pauvreté au Canada. Il peut être utile d’encourager les femmes à chercher un emploi dans les professions les mieux rémunérées et à faire des études dans des domaines traditionnellement dominés par les hommes, mais ce n’est pas suffisant. Les femmes doivent également être traitées de façon équitable sur le marché du travail. On doit leur proposer des possibilités d’avancement claires et la chance de perfectionner leurs compétences et d’en développer de nouvelles. L’amélioration des politiques en milieu de travail – comme les horaires flexibles, le télétravail et le congé parental – qui permettent aux femmes de concilier le travail et la vie familiale, font aussi une différence. Rendre les services de garde d’enfants plus abordables et encourager les hommes à prendre un congé parental sont également essentiels pour améliorer le cheminement professionnel des femmes et accroître leurs possibilités de promotion, et ainsi réduire l’écart salarial entre les sexes.

Certes, un plus grand nombre de femmes dans des secteurs d’activité et des professions mieux rémunérées, un assouplissement des politiques en milieu de travail et des services de garde à l’enfance abordables changeraient sans aucun doute les choses. Mais il faudrait aussi intervenir pour cibler la discrimination et les préjugés inconscients. Les organisations, les entreprises et les gouvernements doivent faire preuve de transparence quant aux pratiques d’embauche, aux salaires et aux exigences en matière de promotion. Les organisations ne peuvent régler les problèmes que si elles en connaissent l’existence, ce qui ne peut se faire que par le suivi et la divulgation de renseignements sur les salaires, les promotions et le recrutement. L’adoption de processus objectifs et transparents relatifs à l’embauche, la rétroaction et la promotion des employés peuvent aussi aider d’autres groupes défavorisés – comme les minorités visibles, les nouveaux immigrants, les Autochtones et les personnes handicapées – à bénéficier d’emplois et de rémunérations justes, ainsi que de possibilités d’avancement.

Afin d’améliorer l’emploi et les salaires des immigrants, il faut en faire davantage pour s’assurer qu’ils ont suffisamment d’occasions de perfectionner leurs compétences linguistiques. En outre, la révision ainsi que la refonte des politiques d’évaluation et de reconnaissance des qualifications des étrangers et des programmes de formation relais ciblés peuvent aider les immigrants à obtenir les attestations officielles et les permis qui sont exigés dans une profession donnée.

Les personnes ayant une incapacité ont besoin d’environnements de travail accessibles et inclusifs. Les programmes relatifs au marché du travail doivent viser à faciliter et à accroître l’emploi des personnes handicapées en mettant l’accent sur des solutions inclusives, qui ne fomentent pas la division13. Les jeunes ayant une incapacité bénéficieraient d’une meilleure planification de la transition entre l’école et le monde du travail, ce qui leur donnerait plus de possibilités de perfectionner leurs compétences et de suivre des formations en vue de se préparer à occuper un emploi. Enfin, les programmes de protection sociale, tels que les prestations d’invalidité de longue durée, doivent soutenir efficacement le retour au travail des personnes ayant une incapacité plutôt que de les dissuader d’y retourner.

L’amélioration des possibilités et des conditions d’emploi pour les groupes défavorisés et ceux qui sont affectés de manière disproportionnée par la pauvreté contribuera à bonifier leur situation socioéconomique, tout en renforçant la cohésion sociale et la capacité socioéconomique du pays.

Notes de bas de page

1    Statistique Canada, tableau CANSIM 206-0032, Limite supérieure du revenu, part du revenu et revenu moyen du marché, total et après impôt, selon le décile de revenu, Canada et provinces (consulté le 26 janvier 2017).

2    Miles Corak, Income Inequality, Equality of Opportunity, and Intergenerational Mobility, Discussion Paper No. 7520, Bonn, Institute for the Study of Labor, 2013, p. 13, 21 (consulté le 7 décembre 2016).

3    Wen-Hao Chen, Yuri Ostrovsky et Patrizio Piraino, Mobilité intergénérationnelle du revenu : nouvelles données pour le Canada, Ottawa, Statistique Canada, juin 2016 (consulté le 17 février 2017), p. 27.

4    Les mesures de faible revenu sont des mesures relatives du revenu visant à évaluer la façon dont les gens s’en tirent comparé à la population en général. Pour une région ou un pays donné, le seuil de pauvreté correspond à 50 % du revenu médian de la population de ce pays ou de cette région. Le taux de pauvreté correspond à la proportion de la population dont le revenu disponible (après impôts et transferts gouvernementaux) est supérieur à ce seuil de pauvreté.

5    Statistique Canada, tableau CANSIM 206-0041, Statistiques du faible revenu selon l’âge, le sexe et le type de famille économique, Canada, provinces et certaines régions métropolitaines de recensement (RMR), (consulté le 28 septembre 2016).

6    Ibid.

7    Statistique Canada, tableau CANSIM 206-0033, Coefficients de Gini du revenu ajusté du marché, total et revenu après impôt, Canada et provinces (consulté le 14 août 2016).

8    Statistique Canada, tableau CANSIM 206-0032, Limite supérieure du revenu, part du revenu et revenu moyen du marché, total et après impôt, selon le décile de revenu, Canada et provinces (consulté le 12 janvier 2017).

9    Gouvernement de l’Ontario, Consultation sur le Projet pilote portant sur le revenu de base; Assemblée législative de l’Île-du-Prince-Édouard, Motion No. 83: Universal Basic Income.

10    Ibid., p. 216.

11    Agence du revenu du Canada, Allocation canadienne pour enfants – Comment calculons-nous votre ACE.

12    One, I Wholeheatedly Agree: Poverty Is Sexist (consulté le 17 février 2017).

13    Organisation de coopération et de développement économiques, Sickness, Disability and Work, 2010; Organisation mondiale de la santé, Rapport mondial sur le handicap, 2011.